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La question du management des transformations du travail ou encore de la conduite du changement est tout à fait d’actualité. En effet, alors que le monde entier a traversé une crise majeure et bien que l’on ai beaucoup parlé du monde d’après, peu de changements d’ampleur se sont manifestés. Cela montre que si la pandémie nous a obligé à nous adapter (= nous confiner temporairement), nous ne nous sommes peu transformés et nous notre quotidien s’est réimposé rapidement.
Cet exemple illustre la difficulté du changement profond : malgré les crises et les évolutions à l’échelle d’une organisation, la transformation réelle des individus peut être difficile et longue à atteindre. Ce constat est vrai dans les entreprises où tout s’est accéléré : les changements deviennent habituels et on parle partout d’agilité. Le rôle du manager est alors devenu clé dans l’accompagnement des individus et le changement à long terme des organisations.
Pour un manager, les enjeux sont doubles. Il s’agit pour commencer de provoquer les transformations à l’échelle globale, c’est-à-dire s’assurer de permettre les transformations du travail. Mais dans un second temps, il s’agit également d’agir à l’échelle individuelle. Il faut accompagner chaque membre de l’entreprise dans l’acceptation du contexte et des changements à venir.
Pour bien comprendre l’enjeu des transformations, il faut se plonger dans le fonctionnement des individus et des organisations. Par essence, tout changement est difficile. Les organisations sont avant tout composées d’individus. Or ces derniers sont notamment influencés par le biais de statu quo et le biais d’aversion à la perte. Ils tendent à percevoir que toute nouveauté engendre plus de risques que d’avantages. En conséquence, beaucoup d’entreprises et groupes souffrent d’homéostasie, l’absence de transformation.
L’histoire et les études sociologiques nous montrent que les plus grands transformations du travail sont souvent associés à des crises. Notre tendance naturelle à l’homéostasie est telle que nous avons besoin d’éléments perturbateurs forts, des crises, pour impulser une dynamique de transformation.
À l’échelle de l’entreprise cela peut se traduire de nombreuses manières :
Il est alors important de noter que chaque crise n’entraîne pas forcément de transformations. L’étude systémique des organisations nous montre que malgré la crise, la tendance naturelle des entreprises est de revenir au statu quo qui prévalait. Le rôle des dirigeants, des coachs ainsi que des managers est alors double : s’assurer lors d’une crise qu’une dynamique de changement soit impulsée, mais plus encore, savoir générer une situation de “crise”, quand c’est nécessaire, pour créer la possibilité d’une transformation.
Nous avons vu qu’il était parfois difficile de déclencher des transformations profondes. Le second enjeu est, lorsqu’une transformation est enclenchée, de faire en sorte que cette dernière soit “réussie”. C’est-à-dire que les différents membres convergent dans une dynamique de transformation commune.
En effet, ce n’est pas parce qu’une entreprise ou une équipe se transforme que chaque membre fait de même. Et quand bien même ce serait le cas, rien ne garantit que les différents individus d’une organisation se transforment au même rythme, dans la même direction, avec les mêmes envies.
Le manager joue alors un rôle clé : catalyser et organiser le collectif des transformations individuelles. Il s’agit de partager une vision commune, de donner du sens, mais aussi d’accompagner, de guider, parfois d’orienter, pour garantir la cohérence des individualités. Imaginez une entreprise qui acquiert un concurrent, certains individus se sentiront menacés. Mais d’autres y verront une opportunité de carrière, d’autres enfin seront contrariés dans leur routine. Le rôle du manager est ici de faire en sorte que ces différentes situations individuelles convergent. Cela servira la vision de l’entreprise (développer des synergies via cette acquisition).
Pour bien accompagner ce processus, il est important de comprendre qu’à l’échelle d’un individu, chaque transformation majeure se fait en plusieurs étapes : deuil de la situation précédente, acceptation du changement, la capacité à se projeter dans une situation à venir. Or ces étapes peuvent être facilitées et accélérées. Préparer les transformations, favoriser la communication, proposer des objets de substitution, responsabiliser et déculpabiliser sont autant de leviers dont disposent les managers pour faciliter les phases de deuil et accélérer les transformations.
Par ailleurs, il est intéressant de noter que ces phases de transformations s’accompagnent souvent d’apprentissages. Or la démarche d’apprentissage fait également passer les individus par des étapes parfois désagréables. En effet, apprendre implique de questionner et modifier des savoirs existants, ce qui peut être inconfortable ou désagréable.
Le manager est un élément clé de la réussite des transformations. C’est un chaînon indispensable pour faire le lien entre une vision stratégique et les individualités sur lesquelles repose toute organisation. Il doit accompagner les individus dans les différentes phases d’acceptation et d’engagement face à une transformation et garantit la cohésion des équipes dans des phases de transformations du travail radicales.
Le rôle du manager est complexe. Il s’agit d’adopter la bonne posture au bon moment, il faut alors être consécutivement manager coach, manager mentor/tuteur, manager formateur, etc. Ce numéro de métamorphisme demande de connaître ces différentes postures, de savoir faire du management situationnel, mais aussi de savoir déléguer quand c’est nécessaire.
Pour réussir, un manager doit aussi connaître ses limites. Face à des transformations importantes, le manager ne peut pas avoir toutes les casquettes et toutes les responsabilités. De la même manière, se poser en manager-coach sans avoir reçu les formations nécessaires peut être dangereux, tant pour les individus que l’organisation toute entière. Les managers doivent donc être accompagnés et formés avec soin pour savoir quand leurs prérogatives s’arrêtent.
Comme nous l’avons vu, les managers peuvent être des catalyseurs de transformation, cela signifie qu’ils peuvent également bloquer ces transformations s’ils ne sont pas moteurs, notamment s’ils manquent de compréhension, préparation ou formation.
Prendre de la hauteur : saisir la méta signification de ce travail. Le manager qui pratique le mieux la transformation est celui qui est conscient que lui-même doit se transformer et transformer sa pratique. Il faut commencer par accepter qu’il n’y a pas de mode d’emploi, pas de zone de confort, il faut accepter de se remettre en question en permanence et d’évoluer soi-même à travers la transformation.
Comprendre les bénéfices du changement : on dit souvent que conduire les transformations c’est insister sur les bénéfices. Il s’agit de ne pas tenter le passage en force et faire preuve de pédagogie pour embarquer dans une vision commune. Pourtant, il est possible et nécessaire d’aller encore plus loin : se mettre à la place de l’autre au point d’aller chercher, non pas les bénéfices du changement, mais les bénéfices du non changement. C’est le meilleur moyen de comprendre les blocages et de trouver les clés pour permettre la transformation attendue.
Paradoxalement, la meilleure manière d’accompagner au changement n’est pas de montrer pourquoi il faut changer, mais de comprendre l’intérêt à ne pas changer. C’est alors seulement que le manager pourra agir efficacement : il est plus facile de faire valoir des bénéfices au changement si l’on connaît les bénéfices au non changement auxquels il s’oppose.
L’analyse systémique, en étudiant les relations à l’intérieur des groupes humains, permet d’analyser l’entreprise au prisme des systèmes qui la composent et des interactions entre ces systèmes. Cela permet de comprendre les dynamiques en présence et comment celles-ci peuvent s’opposer ou non, et ainsi accélérer ou ralentir les transformations.
Qui sont les “champions” qui serviront d’ambassadeurs pour la transformation ? Et qui sont également les détracteurs de ces transformations, aussi flamboyants soient-ils ? Qui sont enfin ceux qui pourraient infléchir la dynamique par la pratique mais que l’on ne voit pas autant que ceux qui s’accaparent du sujet ? Autant de questions auxquelles l’analyse systémique permet d’avoir des réponses.
La démarche systémique permet de mieux comprendre les conditions du changement, à l’échelle des individus et donc de l’entreprise. Il s’agit alors d’étudier les différents paramètres qui influent sur la vie de l’organisation : relations et jeux de pouvoirs, les non-dits et secrets, les objets de substitution, les sentiments de jalousie ou de culpabilité, etc. C’est alors en influençant ces paramètres qu’il est possible d’influencer la manière dont une organisation se transforme.
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